Je me souviens de ces années de mobilisations alors que j’étais adolescent, les balbutiements des veillées commémoratives à la stèle du génocide des Arméniens, les préparatifs de textes et poésies à lire, le montage des expositions, les gardes-à-vous aux flambeaux en tenue de scout, les prières et recueillements, les rassemblements, les défilés et prises de parole revendicatives, pour toujours honorer la mémoire des martyrs de 1915 et réclamer justice pour le peuple arménien.
Il y a eu des années remarquables où l’intelligence et la tolérance des dirigeants ont permis l’unité et la convergence des différents courants, sensibilités et organisations de notre communauté; mais aussi des années à oublier où le jusqu’auboutisme a conduit aux divisions. Le devoir de mémoire, le respect dû aux victimes du génocide impose à chacun l’unité et la communion lors du 24 avril. Il y a assez d’autres jours dans l’année pour ceux qui veulent s’opposer. Ces années noires nous ont appris que ce travail de mémoire doit échapper aux petits calculs ou à toute considération partisane ou politicienne.
Aujourd’hui, c’est un autre ennemi, invisible, un virus qui sème le trouble dans l’organisation de nos cérémonies. Et compte tenu de la situation sanitaire, il est à craindre que cette année encore, les cérémonies du 24 avril soient impactées… Cette année qui pourtant a été décisive, et qui a vu plus de 3500 enfants d’Arménie et d’Artsakh tomber à nouveau au champs d’honneur pour défendre la patrie et le peuple arménien face à la barbarie, au terrorisme et au radicalisme. Le sacrifice de ces enfants d’Arménie et d’Artsakh est supérieure à toute autre raison. Se désunir dans ces circonstances, c’est se disqualifier définitivement.
Enfin, depuis 2019, le Gouvernement organise officiellement chaque 24 avril une cérémonie en mémoire du Génocide de 1915. Attendons vivement la fin de cette pandémie pour que tous ceux qui veulent respecter et saluer la mémoire des victimes de 1915 puissent se rassembler en nombre autour de M. le Préfet de la Drôme. Cet hommage de l’Etat aux martyrs de 1915 était une demande datant de 50 ans et une victoire des défenseurs de la mémoire du génocide des Arméniens. Il doit être le point d’orgue des mobilisations du 24 avril.
Le blog de Noubar Kechichian 